La surcharge attentionnelle, ce mal invisible qui nous éloigne de l'essentiel

Image d'illustration mettant en scène Arnard le Renard'

Invisible mais omniprésente, la surcharge attentionnelle grignote notre concentration, affecte nos relations et sape notre bien-être. Pourtant, nous ne réalisons son impact qu'une fois le point de rupture atteint.

C'était il y a un an, au tout début de l'année 2024. Ce jour-là, je devais fignoler un script de motion design et conclure un dossier de préconisation en conseil éditorial. Deux activités que j'adore et pour lesquelles je suis habituellement dans ma zone de confort. Mais rien n'avançait. Mon esprit était bloqué : impossible de structurer mes idées ou de rédiger une phrase qui tienne la route. J'ai fini par lâcher l'affaire en ouvrant un roman de Paul Auster : si j'envoyais mon cerveau s'oxygéner quelques minutes dans le Brooklyn des années 1990, il allait peut-être respirer un peu et retrouver son efficacité ? Pourtant, là non plus, rien à faire. Les mots glissaient sur la page sans parvenir à retenir mon attention.

J'étais en « freeze ». Paralysé. Comme si mon cerveau avait atteint un point de saturation complet. J'étais en état de surcharge attentionnelle. Un danger qui s'installe en silence.

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La surcharge attentionnelle survient lorsque notre cerveau est débordé par la masse écrasante d'informations qu'il doit traiter : notifications du smartphone, messages Teams ou Slack, mails qui s'accumulent, todo lists infernales... Elle affecte chaque aspect de notre vie. Et nos usages de l'IA générative y contribuent de plus en plus : certes, un mail rédigé en 2 minutes avec ChatGPT représente un gain de temps par rapport à l'époque où nous y passions une demi-heure. Mais en nous permettant d'enchaîner les tâches plus rapidement, ces outils nous poussent à un rythme qui dépasse nos capacités biologiques d'attention, fragmentant notre concentration et augmentant la charge cognitive.

Le problème avec la surcharge attentionnelle, c'est qu'on ne la voit pas arriver : elle est indolore, ne fait aucun bruit et les personnes qui en souffrent n'en ont pas conscience. Elle s'installe doucement. Comme si vous étiez dans une pièce dont la lumière faiblit imperceptiblement, jour après jour. Jusqu'au point de rupture, comme ce jour où j'ai bien été obligé de constater que quelque chose ne tournait pas rond.

Un impact profond sur la vie professionnelle et personnelle

Heureusement pour moi, j'étais aussi en train de repenser mes formations aux usages du numérique, à cette époque-là. C'était l'occasion de tester sur moi-même les recommandations que je fais habituellement en fin de séance : pas d'écran tôt le matin ni en fin de journée, des moments préservés sans notifications et des stratégies pour préférer les brefs moments de "deep working" aux longues journées sur écran. Résultat ? C'est comme si je venais de nettoyer mes lunettes après les avoir portées sales pendant des mois. En quelques jours, mon sommeil s'est allongé de 30 à 40 minutes par nuit et la montre connectée que je portais encore au poignet (!) m'a annoncé que mon niveau de stress avait drastiquement baissé. Je n'en avais évidemment pas pris conscience, tant tout ça s'installe insidieusement.

Dans le cadre professionnel, la surcharge attentionnelle fragmente notre concentration, allonge nos délais de travail et réduit notre productivité. Nous nous retrouvons à jongler entre tâches, emails, et réunions avec la sensation de ne jamais avancer. Cela engendre un stress permanent, qui, à long terme, peut conduire à l'épuisement professionnel.

Dans la vie personnelle, elle nous éloigne des moments essentiels. Ces instants de qualité avec nos proches ou avec les activités qui nous enchantaient disparaissent dans un flot d'interruptions numériques. Ce n'est pas un hasard si de nombreux couples décrivent un sentiment de déconnexion émotionnelle, même lorsqu'ils partagent physiquement le même espace.

La santé mentale et physique est aussi directement touchée. Augmentation du stress chronique, troubles du sommeil et même problèmes cardiovasculaires... Le cerveau, constamment en état d'alerte, finit par craquer. Et lorsque ce point de rupture est atteint, la reconstruction est longue.

Alors, qu'est-ce qu'on fait ?

La première étape essentielle, c'est de prendre conscience qu'on ne va pas très bien. Reconnaître ce poids invisible, comprendre ses mécanismes et ses impacts, c'est déjà reprendre un peu de contrôle. Ensuite, on reprend la main : on se ménage des temps déconnectés, on retisse les liens avec nos proches (et avec le vivant en général), on prend soin de nos compétences en s'abstenant de demander à l'IA une tâche qu'on sait faire soi-même... Bref, on ne laisse pas nos outils numériques décider de notre rythme.

Dans les formations au numérique que j'anime pour le secteur non marchand, je propose des outils pratiques pour retrouver du temps, de la concentration et surtout se fabriquer de nouvelles habitudes. Car la voilà, notre faille — et donc la porte d'entrée de toutes ces applications qui dévorent notre temps : nos habitudes. Cette faille qui a permis le triomphe de la captologie théorisée par BJ Fogg, le chercheur de Stanford qui enseigne aux entreprises de la big tech comment hacker nos cerveaux.

Et vous, combien de fois par jour sentez-vous votre esprit tiré dans toutes les directions ? Il est peut-être temps de faire le premier pas pour retrouver l'essentiel avant que la surcharge ne devienne insupportable.

Transparence charte IA : cet article a été rédigé et vérifié par un humain (moi !) puis relu dans un process de vérification itérative des faits exposés par Claude Sonnet 3.5 et Claude Sonnet 4.5. Les éléments composant l'illustration ont été générés par Gemini d'après un prompt produit par Claude Sonnet 4.5 selon mes instructions, puis assemblés dans Canva et exportés avec Gimp. Les opinions exprimées ici sont les miennes. Ce billet a fait l'objet d'une mise à jour le 22 octobre 2025.