Pour rédiger vite et bien avec une IA, ne la promptez pas
18/11/2025
Vous devez rédiger des contenus professionnels avec une IA générative (page web, étude, rapport, etc.) ? Alors j'ai le plaisir de vous offrir l'astuce du copywriter pour travailler vite et bien, économiser votre charge cognitive et obtenir un texte solide ! Attention, c'est contre-intuitif : NE PROMPTEZ PAS !
Vous connaissez Jean-Michel Kissaitout ? Non ? Tant mieux pour vous ! Car Jean-Mi, c'est ce collègue donneur de leçons qui a toujours raison. Ce gars d'une indulgence indestructible pour ses propres lacunes, mais qui se transforme en champion du monde de perfectionnisme si on l'invite à donner son avis sur les travaux des autres. Vous voyez le genre ?
Sérieusement, vous vous risqueriez à lui confier la rédaction d'un texte, à Jean-Mi ? Non, hein ! D'une part, parce que vous savez bien que le résultat sera bâclé et sans intérêt. Mais surtout, parce que ce sera d'une telle médiocrité qu'il faudra tout reprendre après lui. Entre le temps perdu à le mettre au travail en lui expliquant les tenants et les aboutissants du projet, puis celui que vous allez gaspiller à rendre sa copie présentable, ça n'en vaut pas la peine.
La bonne stratégie avec ce profil, c'est d'exploiter sa personnalité toxique à votre profit. Bricolez rapidement un brouillon imparfait, puis soumettez-le à Jean-Mi « pour correction ». Cette fois, il va vous épater ! Stylo rouge en main, notre Jean-Mi va se régaler en déployant toute la mesure de son talent. Car étaler sa supériorité en soulignant les erreurs et les approximations des autres, chez lui, c'est plus qu'une passion : une vocation... Vous pouvez lui faire confiance pour vous rendre une copie impeccable et vous expliquer longuement toutes vos erreurs.
Les IA génératives sont des Jean-Mi comme les autres
Figurez-vous que ChatGPT, Claude ou Gemini sont d'authentiques Jean-Mi. Certes, contrairement à votre collègue imaginaire, ces chatbots n'ont ni ego ni intentions (souvenez-vous de la Chambre chinoise...). Mais leur nature même de LLM produit les mêmes « comportements ». Même si vous les promptez le plus précisément possible pour leur demander d'écrire un texte à partir de zéro, ces IA devront en inventer la structure, l'angle et le ton. Des tâches pour lesquelles elles n'ont aucun talent, puisqu'elles ne réfléchissent pas. Elles se rabattront plutôt sur les schémas digérés dans leurs données d'entraînement : l'article corporate, la landing page optimisée pour le SEO, le post LinkedIn... Puis elles moulineront l'ensemble et vous serviront une copie statistiquement standard. Vous vous retrouverez donc devant un texte sans intention, affligé de toutes les scories du « généré par IA » : des formules creuses, une « pensée » sans nuance assenée en trois bullet points, des redondances éparpillées d'un paragraphe à l'autre et la subtilité d'un rouleau compresseur. Et là, vous vous demanderez ce que vous avez raté dans votre prompt parfait...
Donnez-leur un brouillon : elles feront des miracles
Au contraire, si vous vous contentez de leur soumettre un brouillon en précisant que vous souhaitez un résultat amélioré, vous leur fixez un ancrage. Elles n'ont pas à simuler une intention, puisque c'est vous qui donnez le cap. Et comme elles sont particulièrement efficaces pour détecter des patterns, repérer des incohérences et suggérer des alternatives, elles peuvent réellement vous rendre service.
Par exemple, pour le présent billet, j'aurais pu prompter : « Rédige un article de blog professionnel de 800 mots expliquant pourquoi il ne faut pas utiliser les IA génératives pour rédiger from scratch, mais plutôt pour corriger un brouillon. Ton de vulgarisation, vouvoiement, exemples concrets. » Et j'aurais obtenu un résultat qui ne m'aurait pas plu et que je me serais épuisé à réécrire en « humain ». Alors qu'en bricolant un premier jet puis en le confiant à la machine avec ce prompt : « Voici mon brouillon. Corrige les lourdeurs de style, repère les incohérences, suggère des alternatives pour les formulations maladroites. Conserve mon ton et ma structure », je garde le contrôle sur ma prose : pas de délégation toxique à l'IA. De plus, plutôt que d'observer passivement la machine travailler à ma place, je reste actif : pas de décharge cognitive. Enfin, je ne perds pas un temps fou à relire et corriger une prose imbuvable : pas de perte de sens. Je gagne donc un temps considérable sans abîmer mes compétences, sans m'exposer à la surcharge attentionnelle et en restant aux commandes.
Essayez, la prochaine fois que vous devrez rédiger un texte ! Vous constaterez que le meilleur moyen de cohabiter avec ces outils, c'est de s'en servir. Pas de les laisser nous asservir, comme je le répète inlassablement dans mes formations IA pour le non-marchand à Bruxelles et en Wallonie.